samedi 7 avril 2012

Happy Soup - Baxter Dury


Août 2011 sortait dans les bacs Happy Soup, le nouvel album de Baxter Dury. Ce nom ne vous dit peut être rien et sa musique semble loin de vos oreilles, pourtant vous connaissez tous au moins la chanson « Trellic » puisqu'elle fut utilisée pour une pub d'un célèbre pourvoyeur d’électricité Français. De plus, le fils de l'inventeur de la maxime « Sex, Drugs & Rock'n'Roll » n'est pas l'illustre inconnu que l'on croirait puisque Happy Soup est en réalité son troisième album. Certes les deux premiers ne se sont pas écoulés à des millions d'exemplaires, mais l'envie de bien faire est toujours grande lorsque « papa » est une rock-star. Alors, Baxter Dury s'est penché pendant plus de 5 ans sur cette Happy Soup. Le résultat est époustouflant de maîtrise.


La maîtrise, c'est le maître mot de cet opus. Il suffit d'écouter le titre « Happy Soup », un modèle du genre, voix grave pausé sur une batterie minimaliste et trois accords sur un clavier. Progressivement s'y ajoute un arpège envoûtant puis des chœurs féminins qui ne sont pas sans rappeler ceux usitées par Serge Gainsbourg. L’atmosphère rendue est pesante, à nul moment la chanson de s'emballe et pourtant on sent qu'elle le voudrait. Pire, tout notre corps le souhaite, cette lent marche ne peux que se terminer sur une explosion. Dury la retient tout en douceur et nous sert, en lieu et la place d'effusions de rythmes, un solo comme autant de liens venant sceller ce petit bijou de maîtrise musicale. Cameron Crowe donnait les mots suivants à Tom Cruise dans « Vanilla Sky » : « Le plaisir naît de l'attente de celui-ci. » Baxter Dury applique à la lettre cet adage et dans l'attente d'une envolée promise à cet « Happy Soup » nous fait prendre notre pied chaque second que celle-ci met... à ne pas venir !
La comparaison à Gainsbourg n'est pas innocente. Souvent utilisée dans les médias, il est vrai qu'on ne peut pas nier un air de ressemblance dans les ambiances créées par les deux protagonistes. Le rapprochement s'affirme sur la période « Initail BB » du grand Serge. Pour autant il n'est pas si simple de trouver de vrais points communs entre ces deux. La musique du Français est loin du post-retro-indie proposé par B.D. (Je viens d'inventer ce mouvement, je n'ai pas trouvé mieux pour définir le style!) Gainsbourg aimait la musique plus nature, moins éléctro. Question de génération me direz vous, mais S.G s'est bien intéressé au Reggae, sa curiosité a toujours été poussée vers le côté plus traditionnel de l'instrument. Son sample de la « Symphonie Du Nouveau Monde » d'Antonin Dvorak sur « Initial BB » est la preuve de l'attachement de Gainsbourg à la musique classique. Peut être que la sublime voix de Madelaine Hart nous rappel inconsciemment la voix d'une Brigitte Bardot dans la fraîcheur de l'âge, puis ce ton parlé à la manière de « Leak At The Disco » est souvent présent sur les disques de Gainsbourg.
Il ne faut cependant pas laisser cette comparaison faire croire qu'Happy Soup manque d'originalité. Loin de moi cette idée.


Chaque titre a du cachet et un ton propre. A la manière d'un livre de contes, les chansons s’enchaînent passant de thème en thème comme on tourne les pages d'un livre. Ironiquement déprimant dans « The Sun » ou amoureux pervers dans « Isabel », Baxter Dury offre l'occasion à chacun de se reconnaître au travers de personnage ou d'anecdotes proche de la vie de tout un chacun. Ce qui est intéressant c'est sa façon d'amener ces textes à l'encontre de la musique sur laquelle ils sont posés. Cela leur donne une tournure parfois différente de ce que l'on aurait pu ressentir avec d'autres mélodies. Pour éclaircir mon propos reprenons la chanson « The Sun ». Sujet des paroles : un certain Johnny « joue » seul chez lui avec son revolver. On imagine déjà la catastrophe, les violons, le solo de guitare déchirant la tragédie de ce désespoir à la façon d'un « Still Loving You »... Dury part totalement à l'inverse et sert sa chanson avec une guitare slide façon vacances à Hawaï, je ne parlerai pas de la batterie à deux doigts d'« Aux armes et caetera » ni des pseudo pleures de la fin ressemblant plus il faut l'avouer à un rire contenu. Bref, Dury fait d'un texte sur la solitude une chanson ironique et légère.
C'est un autre aspect à souligner. La légèreté que la musique apporte avec cette sensation que l'on rentre dans un monde irréel, mélange entre les années 80 et nos jours. La légèreté est souvent associée à des tempos lent où les basses et batteries sont coincées dans le fond ; ici c'est tout l'inverse. La batterie est sèche et ultra présente, idem pour la basse qui lead bien plus que la guitare qui sert plus d'accompagnement grâce à quelques notes flottantes et autres solos très sixties comme sur « Picnic On The Edge ». Ce qui contre balance avec la puissance offerte par le couple rythmique, c'est encore une fois cette si douce voix de mademoiselle Madelaine Hart mais surtout l'utilisation de claviers : rien de mieux pour tapisser le fond d'une bonne chanson ! Prenez « Afternoon », cette petite suite de notes façon violon et bourdon éléctro ? C'est de ceci dont il est question. Juste de quoi faire entrer en lévitation une chanson qui serait restée ancrée au sol sans cet astucieux ajout. Encore une fois ces parties de synthés sont soumises à la maîtrise et la retenue de Dury. Probablement seul point gris clair, (je n'ai pas le courage de soumettre un point noir à cet album) n'aurait-il pas fallu un peu plus de laisser-aller ? Sans doute le flegme British qui se veut au-delà des émotions personnelles trop importantes...


Baxter Dury nous quitte sur « Trophies », seule chanson laissant vraiment le devant de la scène aux claviers pour une sortie de ce monde entre deux âges tout en douceur. Une fin toute relative tant il est tentant de se relancer dans cet univers parallèle créer par B.Dury. Entre une atmosphère qui colle à la peau, des airs légers et une maîtrise absolue de chaque notes parvenant à nos oreilles, Happy Soup est une réussite. Pour moi cet album n'entre dans aucun genre, Baxter Dury fabrique lui-même le courant musical dans lequel il s'inscrit, c'est de là que ressort la fraîcheur de sa musique. Et c'est pour ça qu'on en redemande, et vite !






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