Il
y a deux semaines je m’étais penché sur trois films abordant chacun à leur
manière leur vision des artistes qu’ils mettaient en valeur. L’un des
réalisateurs se nommait Davis Guggenheim et j’avais émis l’idée son
documentaire It Might Get Loud soit l’un de nos futurs sujets de conversations,
cette idée prend forme aujourd’hui ! Je n’ai pas pu m’empêcher de le
revoir après l’avoir mentionné dans mon article. Autant vous prévenir, il
s’agit sans doute du film que j’ai le plus vu et revu. Je n’arrive pas à
regarder plusieurs fois le même film mais celui-ci, qui est par ailleurs un
documentaire plus qu’un film, me passionne toujours autant même après la
cinquième vision !
Voici un lien pour le voir en entier gratuitement :
Le
principe du documentaire est pourtant simple, prendre trois monstres de la
guitare appartenant chacun à une époque différente du Rock et les faire se
rencontrer avec leurs guitares et leurs matériels autour d’une table et du
sujet suivant : « Votre approche de la guitare ? » Ce sujet
est durant tout le film découpé en sous partie détaillant pour chacune un peu
plus la personnalité de ces trois génies. Il semblerait d’ailleurs de bon ton
de les présenter (chose que Guggenheim film à merveille dans les cinq premières
minutes du film). Commençons par le plus ancien, Jimmy Page de Led Zeppelin né
en 1944, puis The Edge, incontournable membre et architecte de la musique de U2
né en 1961 et Jack White né en 1975, membre fondateur des Raconteurs et des
White Stripes ayant désormais une superbe carrière solo devant lui. (cf. BlunderBuss).
Ce n’est pas anodin si j’annonce leurs dates de naissances, Guggenhiem met en
relief l’évolution que le Rock a connue entre Page et Edge ainsi qu’entre Edge
et White. Cette même évolution qui fait que l’on entend Jimmy Page s’extasier devant la distorsion, The
Edge en avoir assez des solos de 30mn et
Jack White vouloir oublier le surplus d’électronique dans le Rock.
The Edge |
La
beauté de ce documentaire réside dans la multitude d’approche qu’il nous est
donné d’avoir par rapport à ces trois hommes. En mêlant interview privée dans
des lieux importants de leur carrière (The War House pour Edge, Headley Grange
pour Page…), lives respectifs, image d’époque et la réunion dans le salon
d’enregistrement, Davis Guggenheim expose nos oreilles à ce que la musique a fait
de mieux sous toutes les coutures. Tous ces documents se mélangent mais c’est
tour à tour qu’ils nous expliquent leur parcours, leurs guitares, leurs envies,
le tout enrobé d’anecdotes de la plus anodine (comment John Bonham a obtenu par
hasard son son de batterie sur
« When The Leeve Breaks ») à la plus fondatrice (panneau sur
lequel l’annonce de Larry Mullen Junior a été postée pour former le groupe que
nous connaissons désormais sous le nom de U2).
Jimmy Page |
Et
même si The Edge semble tenir un peu plus de temps à l’écran, c’est avec une
répartition somme toute égale que ces trois magiciens de la musique se
découvrent. On a ainsi la surprise d’approcher l’enfance au milieu d’une
fratrie de dix enfants de Jack White ainsi que son approche à reculons par rapport
à la guitare et même par rapport à la musique en général. Etant sans doute le
moins médiatique des trois, j’ai eu l’impression d’en apprendre plus sur J.White
que sur les autres : ses débuts avec Meg White au sein des White Stripes,
son gout prononcé pour le blues des années 30 et son amour pour la nouveauté,
pour la créativité en lieu et place de l’innovation matérielle. Deux scènes
prenantes résument relativement bien le personnage : l’écoute de sa
chanson favorite de Son House « Grinnin’ In Your Face » et son
dévouement total sur scène quitte à laisser sa guitare pleine de sang à la fin d’un concert. Passion, intégrité et originalité sont les trois maîtres mots
pour le décrire, et ce fut pour ma part une surprise car tant dans
l’introduction du film que par ouïs dire, j’avais un apriori négatif sur le
personnage que je trouvais pédant voir suffisant. C’est donc avec plaisir que
mon regard a totalement changé devant autant de qualité musicale et humaine.
S’il
est bien une information qui m’a fait frissonner lors de ce visionnage, c’est
d’apprendre que nous ne sommes pas passé loin de ne jamais connaitre Led
Zeppelin avec Jimmy Page ! Habitué des tournés dans le froid et le ventre
vide avec ses anciens groupes, il n’a pas été loin de raccrocher sa guitare
pour se consacrer à une autre de ses passions : la peinture. C’est avec un
sourire amusé que l’on écoute le très (très) jeune Jimmy Page passer à la TV pour un
petit morceau et c’est avec une admiration folle qu’on l’écoute (et
regarde !) jouer, de nos jours, « Rumble On » dans son grenier
aux multiples instruments.
Jack White |
Finalement,
l’essence même du film se créer lorsque nous découvrons que nos idoles sont eux
même guidés par leurs propres idoles ou morceaux fétiches. Ils en redeviennent
humain, descendent du piédestal sur lequel nous les avions mis, pour y faire
monter leurs idoles. C’est ainsi que nous voyons Jack White s’extasier devant
un vinyle acapella, Edge se sentir
vivant en voyant naitre le punk à Top Of The Pops avec The Jams, le plus
heureux de tous semble encore être Jimmy Page et sa collection impressionnante
de vinyles nous faisant partager un morceau mille fois trop simple pour ses
doigts mais qu’il adore « Rumble » de Link Wray. C’est aussi ce sentiment qui prédomine dans ce qui restera ma scène préférée, elle se déroulelors de la réunion des trois guitaristes. Jimmy page glisse la sangle de sa Les Paul et entame le riff de « Whole Lotta Love », The Edge se rapproche avec attention et un petit sourire au coin des lèvres de celui qui se délecte de pourvoir assister à un tel événement. Jack White, déjà bien placé, ne peut que poser sa guitare et son visage se transforme en celui d’un enfant à qui l’on vient de donner le plus beau des cadeaux. Car s’il y a bien une légende dans
toute la salle ce jour-là ; c’est bien Page, n’oublions pas que ses riffs
ont bercé les oreilles des deux autres (et les notres !) Et c'est ainsi que, malgré tout leur talent, Jack White et The Edge ont pris une leçon!
It
Might Get Loud est un chef d’œuvre du genre qui plaira à ceux qui comme moi
aime la musique mais aime aussi ceux qui la font vivre. Comment ne pas aimer des
artistes qui, après des années de tournées, des millions cumulés, des albums
vendus à la pelle, arrivent à s’extasier comme des enfants devant un simple
riff ? C’est sans doute le but ultime que Guggenheim a réussi à
atteindre : faire disparaitre l’icône pour faire apparaitre l'amoureux de musique.
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