vendredi 26 octobre 2012

Vise Le Ciel (ou Bob Dylan Revisited) - Francis Cabrel (Mais pas que!)

A la lecture du titre, certain se disent déjà « Encore du Cabrel, comme s’il n’y avait pas assez d’artistes à chroniquer ! » Ils ont sans doute raison, après tout, tant qu’à faire un blog musical autant varier les plaisirs, les genres et les chanteurs. Mais moi, j’adore Francis Cabrel. Je l’aime d’autant plus qu’il reprend, dans son nouvel album sorti cette semaine, une autre de mes idoles de la Folk : Bob Dylan. C’est donc tout naturellement qu’il devient le premier artiste de From (The Sounds) Inside à se voir consacrer une deuxième chronique. Alors pour contenter tout le monde, je profiterai de cet album pour aborder le thème de la reprise, des « Cover » comme aime le dire les plus anglophones d’entre vous, dans le monde de la musique.


Je ne présente pas Francis Cabrel, monolithe de la musique Française, prêcheur du bon gout musical et de la réserve médiatique. N’hésitez pas à lire le précèdent article sur ce qui restera pour moi l’un des meilleurs albums Français.
Il va donc de soi que Vise Le Ciel est un bon album. Vous pensez sans doute qu’en reprenant Dylan, le risque était minime tant ses chansons touchent au génie ; ce n’était pas gagné pour autant. Le phrasé de l’Américain n’est pas simple à traduire, sans parler qu’il ne fallait pas non plus tomber dans la facilité au niveau des arrangements car, ceux de Dylan sont, avouons-le, déjà mythiques.
C’est donc avec un certain défi que Cabrel s’attaque à onze titres, plus ou moins connu, de son idole absolu. Ce n’est pas la première fois qu’il traduit Monsieur Dylan, déjà sur son précédent album Des Roses Et Des Orties il avait repris « She’s an artist » avec brio. Il admet pourtant lui-même qu’il ne sait pas faire de chansons, qu’il doit tout à son mentor : « C’est Bob Dylan qui m’a appris à chanter, […]  j’écris comme il m’a appris.». 

Et bien, Dylan aura été bon professeur car, mis à part « Comme Une Femme » qui penne à suivre l’original (ou peut être qui voulant trop le suivre perd en fluidité), le reste de l’album est tout bonnement un régal. Je porte une mention spéciale à la reprise de « All Along The Watch Tower » noté « D'En Haut De La Tour Du Guet »  sur l’album du Français. Cette chanson fut reprise par les plus grands (Jimi Hendrix, U2, Keziah Jones, Pearl Jam et j’en passe…) sans jamais vraiment se voire changer, transformer. Cabrel, lui a eu la bonne idée de changer l’orchestration, si bien qu’il aura fallu attendre que je me traduise les paroles pour m’apercevoir de la transformation opérée. De même pour « Il Faudra Que Tu Serves Quelqu’Un » qui est gratifié d’une guitare « slide » pour notre plus grand plaisir. C’est par petites touches, sans sembler vouloir se les approprier réellement, que Cabrel nous fait découvrir et redécouvrir la Folk si douce et chaleureuse de Bob Dylan. Bonus pour les non-anglophones, les textes sont traduits pratiquement mot à mot des textes originaux. Ce détail a par ailleurs agacé Francis Cabrel qui explique la gêne qu’il eut pour harmoniser ses traductions ainsi : « Le problème avec l’anglais, c’est qu’en une phrase Dylan fait passer cinq images, c’est une langue compacte. Alors qu’en Français, avec la grammaire et les règles de syntaxe, sur une même phrase j’ai, malheureusement, du choisir deux ou trois image et donc en perdre par rapport à l’original. » Qu’il se rassure, que ce soit « Je Te Veux » ou même « Comme Blind Willie Mc Tell » (un vrai délice de Folk/Blues) la traduction n’enlève rien à l’esprit premier de la chanson.

Francis Cabrel n’est pas le premier à reprendre le répertoire d’un autre artiste pour lui rendre hommage. (Je passerai sous silence ceux qui pour « relancer » leur « carrière » trouve de bon gout de massacrer « A Nos Actes Manqués » de Jean Jacques Goldman…) Pour certain, comme Eric Clapton, le style qu’ils abordent s’y prête bien. Le Blues a des racines si lointaine qu’il semble impossible de rendre hommage à tous ceux qui inspirent les grand Bluesman (qui d’ailleurs eux même inspireront la génération d’après). Eric Clapton a sorti récemment deux très bons albums de reprises. Ne se limitant d’ailleurs pas à un seul artiste sur l’album Clapton datant de 2007, il avait rendu un hommage sublime à Robert Jonhson sur Me And Mr. Johnson. La question du pourquoi reprendre alors que l’on peut inventer n’a pas lieu d’être dans ce cas précis, ni dans celui de Cabrel d’ailleurs. Dans leur domaine respectif ils ont démontré qu’ils n’avaient rien à envier à personne, à partir de là, l’envie de partager ses émotions au travers ce qu’on chérie le plus en tant que musicien prend le dessus et cela nous offre de beau instant de musique. Dans la catégorie des chanteurs faisant un album hommage, j’aimerai citer Scott Walker qui reprend Brel avec une ferveur rare sur Scott Walker Sings Jacques Brel. L’anglais n’est pas toujours la meilleure façon d’aborder les textes de Brel, mais l’orchestration et la vivacité de cette langue fait vivre sous un tout autre jour « Amsterdam » ou « Mathilde ». 

Il existe d’autres façons de rendre hommage à un frisson qu’un autre nous a procuré que de faire un album complet sur son œuvre. Les concerts se prêtent bien à ce genre d’exercice. Pour ceux qui n’aiment intégrer que des phrases ou de courtes parties de chanson (ces petits morceaux sont nommés « Snippet ») il y a U2. « Amazing Grace », «It’s Only Rock’n’Roll », « God Only Knows », “Don’t Stop Till You Get Enough” et bien d’autres sont au programme ne serais ce que sur leur dernière tournée ! Avant ça ils avaient repris « Helter Skelter » des Beatles lors de Rattle And Hum, et il ne faut pas pousser Bono pour qu’il s’attaque à n’importe quel morceau. 

Sinon il y a toujours la façon de faire de Jamie Cullum qui s’approprie totalement les chansons qu’il reprend. Dans sa folie jazz certain titres sont devenu culte « Don’t Stop The Music » (Rihana), « High And Dry » (Radiohead) et surtout « The Wind Cries Mary », reprise de Jimi Hendrix sublimement interprété dévoile toute les subtilités qu’Hendrix était capable d’inventer. (De ma part, adorateur du maître Hendrix, aimer une reprise à ce point ne doit que vous encourager à aller l’écouter !)


Que ce soit Cabrel, Clapton ou Cullum, chaque artiste a besoin de montrer ses racines pour se faire comprendre et surtout pour se faire plaisir ! Avec Vise Le Ciel, Francis Cabrel se fait plaisir en nous faisant redécouvrir certaines chansons oubliées de Bob Dylan, et nous en profitons pleinement. Il est tout de même rageant de penser qu’aucune des chansons de l’album ne soit de sa propre main, en amoureux des mots il sait tout aussi bien nous faire voyager au son de son Blues qu’avec ses textes si finement taillés. Vivement la suite !


vendredi 19 octobre 2012

Ça Me Vexe – Mademoiselle K

Lorsque le sujet de conversation se tourne vers la musique avec mes amis, inévitablement des désaccords sont à prévoir. La discussion s'anime et même si nous partageons pour la plupart le même point de vue sur un grand nombre de choses, certains artistes restent des sujets de discorde insoluble. Celle pour qui je dois me battre le plus souvent corps et âmes pour faire accepter son talent est l'artiste du jour : Mademoiselle K.


Sans conteste, pour moi, la seule Rockeuse Française, la (grande) majorité de mes connaissances la désavouent sitôt son nom prononcé. Une sorte de rejet, trop automatique à mon goût, qui a pourtant du mal à être argumenté. Est-ce, pour mes congénères masculins, la peur de la femme Rock et de son émancipation puissamment revendiquée ? Ou peut être ce look si particulier qui laisse la place au rejet de l'image ? Ou simplement la méconnaissance de ce qui semble être le renouveau du Rock féminin ?
En mettant de côté son extravagance scénique (perruque iroquois rouge et juste au corps chair, à s'y méprendre sur ce qui se cache sous le blouson noir...) écoutons Katerine Gierak chanter. Si je souligne le verbe « écouter », c'est que j'ai bien peur que la plupart des détracteurs n'aient pas vraiment tenté l’expérience d'une écoute, pourtant il s'agit là d'un vrai voyage au sein du monde si particulier de Mademoiselle K. Prenons le voyage si personnel qu'elle nous propose avec son premier album : Ça Me Vexe.


Souvent, un premier album ça ne parle pas de soit. Il est difficile d'écrire sur soit sans passer pour un adolescent attardé qui souffre de sa mue. Pour contourner le problème Mademoiselle K tente de se cacher derrière un premier titre dédié au publique qu'elle invective au travers même des paroles. Ce « Reste Là » est doux, très mélodique. C'est un des nombreux talents de la jeune native de Levallois-Perret, réussir à joindre une mélodie envoûtante à des rythmes pourtant très Rock et hachés rythmiquement. Si me croire sur parole n'était pas suffisant il suffit d'écouter l’enchaînement « mélodie/rythmique/mélodie » de « A Côté » qui plusieurs fois se mélange et s'inverse, cela devient jouissif. Je mets d'ailleurs au défi quiconque de ne pas se voir sauter partout durant le passage de cette chanson. Pour finir avec cette introduction d'album, le titre « Ça Sent L’Été » dévoile entièrement le visage de Mademoiselle K qui assume au travers cette chanson pleinement le rôle d'un album centré sur ses expériences tant sentimentales que professionnelles.

Le décors du voyage est planté. Les méandres de l'esprit tortueux de Mademoiselle K seront notre paysage et sa musique notre moyen de locomotion. Ayant travaillée la plus grande partie des morceaux seule ainsi que les arrangements, la musique se lie très fortement aux paroles. Bien plus que ce qu'offre son deuxième album par exemple. C'est aussi en ça que le voyage est immersif, le contenu de Ça Me Vexe provient pratiquement exclusivement du même esprit que l'on nous offre de sonder. De quoi s'approcher au plus près de l'âme des chansons proposées.
Premier arrêt dans ce voyage, le monde du business qui à eu du mal a accepter le style et la fougue de Mademoiselle K. Avec l'hypothèse d'une musique fondamentalement reliée aux paroles, il est plus facile de comprendre sa relation au monde du travail au vu des sons proposés. En trois titres très (très) énervés, elle se permet de tailler un costume sur mesure aux trois facettes ce monde qui la dérange. Tout d'abord, son single « Ça Me Vexe » ne peut être plus explicite à ce sujet. Complainte musclée sur le club fermé de la musique qui ne veut pas d'elle dans ses festivals, ses soirées et ses studios alors qu'elle fait salle comble en province depuis quelques années déjà. Elle avoue aussi être un peu dépassé par ce système dans lequel tout est rendez-vous et responsabilité au travers d'une des chansons les plus aboutis de l'album « A Côté ». Elle s'en décharge avec humour se voyant mourir cent fois pour faire bouillir un œuf, humour et Rock'n'Roll que demander de plus ? Enfin, l'hypocrisie du showbiz qui l’exaspère au plus au point dans « A L'Ombre ». Encore une fois elle utilise tout ce que la palette Rock offre comme possibilité, et nous gratifie d'un crescendo de batterie sur « A Côté » tout en efficacité.


Deuxième arrêt, le cœur. Plus grande partie de la visite, c'est aussi la plus périlleuse. Je pense que c'est ici que la séparation entre les auditeurs se forme. En l'espace de cinq chansons, dont l'ordre importe beaucoup, se déroule les étapes d'une séparation et d'une déprime profonde. Et je me demande si, les personnes qui n'accrochent pas et/ou ne se retrouvent pas au travers d'au moins un de ces cinq titres, a déjà vécu une vraie séparation. Pas celle d'un flirt de deux trois mois, pas celle qu'on oublie dans les bras d'une blonde le lendemain, mais plutôt celle d'une vraie relation, celle qui se vit comme un deuil, qui vous fait pleurer seul devant une barquette de Nems... L'action en est presque cinématographique, se déroule sous nos yeux l’indécision (Le Cul Entre Deux Chaises), le désir de vengeance (Crève), la jalousie (Jalouse), le manque (Fringue Par Fringue) et le désespoir dans l'acceptation (Plus Le Cœur A Ça) dans un même album. Alors même si elles sont mélangées aux autres thèmes, leur ordre est précis et a du sens. Encore une fois, la dualité musique/parole est spectaculaire. Que ce soit l'urgence fiévreuse des paroles de « Fringue Par Fringue » représentée par cette fuite en avant de la mélodie finale, ou que ce soit la violence et le tranchant de la distorsion pour « Crève », la musique vient toujours s'appuyer sur une ossature textuelle des plus crue et réaliste. Ce tour d'horizon des multiples émotions est pour ma part une grande réussite. Éviter les lieux commun que nous offre la majorité des chansons sur ce sujet est loin d'être évident, qui plus est sur cinq chansons se complétant l'une l'autre.

En étape intermédiaire vient s'intercaler le thème de la direction à suivre au sens large de la question. « Grimper Tout Là- Hau» pose la fameuse question « où va t-on ? » sans y répondre mais rajoute de la profondeur à la réflexion générale que vous pourrez vous faire de l'album. Sans être un arrêt à part entière cette chanson reste néanmoins une pause sur le chemin crée dans notre esprit.


Une fois la dernière seconde de « Plus Le Cœur A Ça » passée, le voyage se termine. A la fois amère et pourtant plein d'entrain, il est impossible d'en sortir sans avoir envie d'explorer un peu plus ce monde de sentiments si éclectiques.
Mademoiselle K s'impose comme LA Rockeuse Française. Pas toujours juste, dissonante même par instant, elle nous sert un album d'une grande qualité et nous rappel que le Rock c'est aussi quand ça déraille légèrement que c'est bon.

jeudi 11 octobre 2012

BB Brunes est devenu grand!


Nous sommes le 29 février 2008, il est environ 22h30 et je sors trempé d’un concert et je ne sais si mes oreilles sifflent à cause de la sono réglée au max ou des cris stridents de la centaine de jeunes filles hystériques (et je pèse mes mots) qui n’a cessé de s’époumoner dans l’atmosphère brulante de cette petite salle de Montfavet. La passion était telle que les pompiers se donnaient à cœur joie de nous arroser avec tout ce qu’ils leur passaient sous la main. Ce n’était pas les Rolling Stones, ce n’était pas U2 ou Dylan, ce n’était « que » les BB Brunes. J’étais au premier rang. J’ai tout vu, et malgré la sono, qui rendait incompréhensible le moindre mot prononcé par Adrien Gallo, et cette ambiance proche du chaos que seule une horde de jeunes demoiselles peut créer, il s’est tout de même « passé quelque chose ». Ce petit frémissement qui vous laisse sans voix en sortant, qui vous fait réécouter l’album sans cesse pour essayer de ressaisir cet instant magique où l’émotion est passé des doigts sur les cordes de guitare jusqu’à nos oreilles.


Ce n’est qu’aujourd’hui, avec leur troisième opus dans les mains, que je sais ce que j’ai vu ce soir-là. En réalité je n’ai rien vu, je l’ai senti, j’avais senti un talent. Alors encore à l’état brut, il en manquait encore beaucoup pour en faire jaillir de quoi sortir de la masse des chanteurs qui veulent percer. Le résultat est là pourtant, « Long Courrier » est sorti le mois dernier, c’est une réussite.

S’il vous semble facile de prédire un succès 6 ans plus tard, je vous répondrais juste que je n’ai eu de cesse de clamer la fraicheur qu’a apportée BB Brunes dans le paysage Rock de la musique Française depuis la sortie de « Blonde Comme Toi » en 2006. Car il faut bien l’avouer, être un fervent défenseur de Gallo et sa bande n’a pas toujours été facile. Longtemps estampiller (plus souvent à tort qu’à raison d’ailleurs) du logo « Groupe à faire pleurer les minettes », leur look et leurs attitudes ont souvent effacé la partie musicale de toute critique à leur égard. Il est vrai que « Blonde Comme Moi » fut écrit alors qu’ils passaient le Bac, la profondeur des textes s’en ressent. Désormais, on parle ouvertement de fellation (J’écoute les Cramps), de plan à trois, de première fois (Dis Moi, BB Baise) et grand classique des chansons d’adolescents : de problèmes de cœur (Pas Comme Ça, Houna…). Et même s’ils abusent d’arrêts brutaux pour repartir sur un crescendo de batterie, ce Garage-Rock dépoussière des années de Rock mollasson depuis la fin de Noir Désir. Puis en 2006, les succès de l’année se nomment Faf Larage et Diam’s… autant de raisons d’aimer de la nouveauté dans les rythmes et autant d’énergie en si peu de chansons (si courtes !).

Le souci avec les premiers albums c’est que bien souvent on ne s’en relève pas. En oubliant de se renouveler ou tout simplement en n’en sortant jamais un deuxième trop occupé à dilapider le premier à Ibiza, on ruine tout espoir de se voir écouter de nouveau. C’est donc avec appréhension que j’attendais en Décembre 2009 sorti de « Nico Teen Love ». Quel soulagement d’entendre un renouvèlement, et pas un petit ! En décidant de grandir et de canaliser cette énergie brute, qui caractérisait "Blonde Comme Moi", pour la transformer en mélodie (sérieusement absente du premier opus) profondément ancré dans le Rock Français et Britannique, ils gagnent en épaisseur tant sur le fond que sur la forme. Avec la mélodie, on remarque enfin que A.Gallo sait chanter sans crier sur des rythmes endiablés (Gare Au Loup, (D)andy). C’est d’ailleurs à cet instant que l’on note une quasi absence de sexe dans les textes, plus souvent remplacer par des sentiments tels que l’éloignement (M. La Maudite) ou le manque (Cola Maya) et parfois par des introspections plus qu’agréable (Illuminations)  Alors, bien entendu les tempos sans limite sont toujours présent  mais ne sont pas représentatif de l’album, au contraire, ils semblent plus être des souvenirs du précédent, reprenant la même forme de composition et de chant (Ma Mods, Peut Être Pas Cette Fois). S’il avait été en vie, on aurait pu croire sa patte derrière « Nico Teen Love » et « Britty Boy », tant ces deux chansons transpirent Serge Gainsbourg. Ce sont sans doute les deux meilleures, leur profondeur musicale et textuelle est sans pareille dans l’histoire des BB Brunes à cet instant. « Britty Boy » tel « Initial BB » introduit l’aide ultime à la mélodie : les violons. Les paroles ne sont pas en reste et se voient éclairer de jeux de mot et de double sens agréables à l’oreille. Quant à « Nico Teen Love » il ne s’agit ni plus ni moins du « Bonnie And Clyde » revisité (et bien revisité) à la sauce BB Brunes.

 Il est clair qu’en trois ans, le groupe de Parisiens a décidé de s’orienter vers la mélodie. J’avais alors pensé qu’ils seraient bien avisés de continuer sur ce chemin tant la qualité de ce deuxième album est élevée. Ils ont effectivement poursuivi dans cette voie, grand bien leur en a pris.


Nous sommes le 10 octobre et je ne me lasse pas de « Long Courrier ». Depuis sa sortie, ses mélodies travaillées en collaboration étroite avec Etienne Daho me hante et ne sont pas prêtent de me quitter. Cette fois-ci, les BB Brunes ont totalement oublié le Garage-Rock et distillent une musique plus riche que jamais, puisant dans les meilleurs artifices de la pop des années 80 et guider par le producteur de Gossip : Allan O'Connel, le résultat est époustouflant. La puissance du Rock de Gossip sur les rythmes enivrant de la Pop de Daho, c’est tout bonnement un régal. Encore une fois, les textes évoluent et se tournent (enfin) vers les faits de société comme en témoigne « Police Déprime » ou «Au Garde à Vous », tout en gardant tout de même cette plume dirigée vers les bonheurs/tourments de l’âme (Aficionado, Bye Bye). Ces revirements font la part belle à la voix d’Adrien Gallo, qui est étonnant avec celle-ci. Autant à l’aise dans le Rock de « Rue De Buci » que dans la ballade « Hémophile », le chant à trouver sa place au sein des chansons et n’est désormais plus secondaire. Autre grand atout des BB Brunes et peut-être plus palpable sur ce troisième disque : la puissance des refrains. Depuis 2006, pas un refrain n’a pas été intelligemment utilisé pour relancer une chanson, et si l’impact ne s’était pas produit dans votre tête sur « Nico Teen Love », il se fera sur « Long Courrier ». Car que ce soit « Stéréo », « RIP » ou « Grand Rio » vous ne pourrez vous empêcher un pas de danse ! Dans l’ensemble, c’est un album plus joyeux, presque haut en couleur qui nous est offert, à l’entrée de l’automne, c’est un vrai cadeau.


J’aurais pu faire trois articles reprenant tour à tour chaque album, j’ai préféré tous les aborder d’un seul coup, délaissant souvent les technicités musicales au profit d’un ressentit plus personnel. En inscrivant ce nouvel opus dans une dynamique qui débuta en 2006, j’ai sans doute essayé de justifier que depuis le début, ce groupe mérite qu’on s’intéresse à lui. Car même si l’image n’est pas toujours agréable, l’oreille doit parfois savoir fermer les yeux pour comprendre et entendre ce qui se passe réellement devant elle. Ne voyez plus ces pédant parisiens mais laissez-vous porter par ce qu’ils font de mieux : du Rock. Et tout comme moi en ce soir de février au milieu d’un chaos indescriptible, vous passerez une superbe soirée ! 

vendredi 5 octobre 2012

The Reminder – Feist

En parcourant les différentes chroniques du blog, je me suis aperçu que mon amour inconditionnel pour les voix féminines n’était pas du tout mis en valeur. Le constat est même affligeant, au moment d’écrire ces lignes, seulement trois femmes ont été le sujet d’article ! C’est pauvre. Surtout quand on sait à quel point je délecte mes oreilles d’artiste de l’autre sexe. C’est pourquoi j’ai décidé d’y remédier en offrant l’album, sortie en 2007, The Reminder de Feist à From (The Sounds) Inside ! Pour nuancer ce propos (et pour éviter de passer pour un misogyne fini), j’avais tout de même en réserve un autre article sur une femme (Française de surcroit !) que j’apprécie particulièrement qui attend au chaud de mon disque dur depuis quelques mois, mais cela ne change rien, la parité était loin d’être de mise au sein de ce blog, il en est et sera désormais autrement.

Ce que j’aime chez les femmes, c’est surtout la voix. Cette facilité avec laquelle elles nous emportent, nous touchent et parfois nous renversent est déconcertante. Cette observation est applicable à toutes les chanteuses digne de ce nom, peu importe le style ou même la puissance de celle-ci, l’émotion reste intacte. En parlant de voix celle de Feist est d’une légèreté déconcertante aux premiers abords. Haute perchée, elle me fait penser sur plusieurs chansons à celle de l’artiste Britannique Kate Nash. Ce n’est d’ailleurs pas leur seul point commun, sur certain morceaux, les rythmes et orchestrations sont très semblables, nous y reviendrons plus tard. Pour le moment, nous venons d’attaquer l’album et au-delà de cette voix cristalline, ce qui frappe en premier c’est l’éclectisme des styles traversés.
Contrairement aux deux titres que l’on connait de Feist (« 1, 2, 3, 4 » de la pub à la pomme ou « My Moon My Man » passée en radio) l’album n’est pas plus Pop ou plus Rock que ça et mixe les genres. La première chanson « So Sorry », à ma grande surprise se pare d’air de Bossa des plus agréable. Je m’attendais donc à poursuivre ce chemin aux couleurs du Brésil mais l’album me préparait bien d’autres surprises ! Des rythmes Africains pour « Sea Lion Woman » et des ballades Folk piano-voix comme « Brandy Alexander ». Et c’est dans les détours par la Pop/Rock de « Past In Present » que je dois admettre que tous les styles abordés dans cet opus se voient traiter et bien traiter. L’intelligence de la canadienne réside dans le dépouillement qu’elle donne à la plupart de ses chansons, lui évitant ainsi de s’emmêler avec trop d’artifices liés à chaque genre. Dépouillement sans doute dû au très court laps de temps qu’il lui a fallu pour enregistrer ses treize chansons. En seulement trois semaines a été bouclé l’ensemble des enregistrements, une sorte de prouesse lorsqu’on entend que certain groupe peuvent y passer des années ( Gun’s and Roses pour ne citer qu’un extrême)
Plus tôt j’avais laissé entendre que certaine des compositions présentes sur The Reminder me faisaient penser à Kate Nash. Je ne me lancerai pas dans un parallèle un peu simpliste entre ces deux jeunes femmes souvent issu de tel propos. Mais tout de même, comment ne pas faire un lien entre les percussions et le piano criard  de « Foundation » issue de Made Of Bricks sorti aussi en 2007 et celle de « Feel It All » ou du précédemment cité « Past In Present ».  Mais Kate Nash n’est pas la seule influence qui pourrait vous venir à l’esprit en écoutant l’album ; « Sea Lion Woman » par exemple me fait penser à « Amssétou » de -M-. Alors oui, cette dernière est postérieure dans le temps à l’album de Feist mais les oreilles vont dans le sens des écoutes or j’écoutais -M- bien avant même de connaitre Feist. Mon propos n’est pas de pointer de qui elle se serait inspirée mais plutôt de mettre un lien entre deux chansons, comme cela en en appréciant une, je vous permets, peut-être, d’aller en découvrir une autre.

J’avais fait remarquer dans mon premier article sur Charlie Winston que les chansons choisies pour la radio sont souvent celle que j’aime le moins. Si je me permets un petit aparté, je ne sais pas comment ces chansons sont choisies mais tout de même, que ce soit « Get On Your Boots » pour l’album de U2 No Line On The Horizon ou « The Adventures of Rain Dance Maggie » sur I’m With You des Red Hot Chili Peppers ou bien d’autre, ce ne sont jamais les meilleurs de l’album, loin s’en faut. (Il s'est avéré que " The Adventures of Rain Dance Maggie" était bien mieux sur l'album qu'à la radio pour les mêmes raisons que je vais citer) Et bien The Reminder n’échappe pas à ce fléau. Alors j’admets être un peu dur avec « My Moon My Man » mais la version radio nous enlève tout le plaisir de cette fin en fuite vers l’avant avec cette porte qui claque et ces bruits de pas qui s’enfoncent dans un chemin caillouteux. Cette fin, qui est en réalité le début de « The Park », n’étant jamais diffusée nous empêche de profiter pleinement de l’effet qu’a voulu créer Feist. Et c’est précisément cette fin coupée qui enlevait  le charme du morceau. C’est donc un autre des atouts inattendus de cette écoute : une redécouverte de chanson pourtant sur-écoutée. 

J’ai balayé la plupart des styles usités au travers The Reminder, mais s’il en est un qui pourrait pencher un peu plus dans la balance, c’est cette Folk douce, par moment presque a capela dans « Intuition », le plus souvent à peine soutenu par soit un piano (Brandy Alexander) soit par une ambiance de clavier bien senti (The Limit To Your Love). Bizarrement, cette partie sera la plus courte dans le texte alors qu’elle tient une vraie place dans mon appréciation de cet album. Une métaphore du voyage s’emploie relativement bien pour coucher mon ressenti sur ces passages : Tous les passages hors Folk sont les voyages à l’étranger, ou l’on découvre, apprend, s’inspire et revient parfois différent. Les morceaux Folk sont les retours, moments de tendresse lorsque l’on franchi le seuil de sa maison, instant de calme avant le prochain départ. C’est ainsi que j’ai vécu les différentes étapes de The Reminder.

Pour conclure sur cet album hétéroclite, je ne m’extasierai pas sur celui-ci, le clamant le meilleur d’une époque ou d’une année. Je terminerai seulement en insistant sur la part de risque pris par Feist en proposant autant de diversité. Sans être prétentieux, c’est un petit répit de douceur que l’on se doit d’offrir de temps à autre à ses oreilles.