L’article
du jour a de quoi en surprendre plus d’un, à commencer par moi-même. Pourquoi,
me direz-vous ? Tout simplement parce que l’artiste du jour ne
m’intéressait pas, au plus haut point, il y a de ça à peine deux mois ! J’avais
des aprioris négatifs tant sur sa personne que sa musique. Je lui trouvais cet
air pédant qu’ont les chanteurs « bobos » et ses chansons (enfin, le
peu que j’en avais alors écouté) me semblaient creuses et pleines du malheur
des gens qui n’ont besoin de rien.
Avec toute ces idées prémâchées, il n’y avait que peu de chance que Benjamin Biolay, car c’est de lui qu’il s’agit, ne parvienne à mes oreilles et encore moins qu’il termine sur ce blog. Ce n’est que grâce à la persévérance sans limite de mon collaborateur/ami Paul que cela et possible aujourd’hui. Ayant sans aucun doute tout tenté durant des années pour m’en faire écouter une bribe par ci par là, c’est en désespoir de cause qu’il me balança un jour « Essaye au moins Trash Yéyé, il fut encensé par Alain Bashung… » Si le grand Bashung y trouvait son compte, c’est qu’il devait y avoir quelque chose que je n’avais pas trouvé.
Bizarrement,
c’est La Superbe qui fut le premier album de Biolay à me parvenir et ce fut une
révélation ! Musicalement, on était très loin du vide attendu et le sens
même de certaines chansons me touchait bien plus que je n’aurais pu l’imaginer
auparavant. L’article du jour ne traite pas cet album mais écoutez « Brant Raphsodie », « La Superbe » et « Ton Héritage », sans
doute le condensé de ce que Biolay fait de mieux.
Ou
tout du moins, avais fait de mieux sur cet album, car celui du jour, Vengeance,
n’est pas mauvais du tout non plus ! Sorti il n’y a même pas un mois,
c’est avec une attente non dissimulée que je me le suis procuré. J’avais un peu
peur d’avoir tout entendu de lui. Lors ce que je « découvre » un
artiste, je l’écoute jusqu’à l’overdose ; je craignais d’avoir atteint ma
limite et si l’album n’atteignait pas mes attentes, il tomberait aux
oubliettes. Comme vous vous en doutez, j’en parle aujourd’hui alors c’est qu’il
m’a agréablement surpris. Je n’irais tout de même pas jusqu’à
« comblé » car tout n’est pas parfait dans ce nouvel opus mais la
majorité des idées misent en place démontrent, s’il le fallait encore, l’étendue
du talent de celui que l’on surnomme facilement BB.
La
bonne idée de Vengeance est la multitude de duo. La moitié de l’album en est
composée, ce qui n’est pas négligeable pour un album dit « solo ».
Ces duos sont nés pour la plupart du fait que Benjamin Biolay n’est pas que
chanteur, c’est aussi un producteur et un amoureux de la musique en général.
C’est ainsi, alors qu’il finissait tout juste d’écrire « Profite »,
que Vanessa Paradis venant s’enregistrer dans le studio d’à côté, s’est vu
proposer de l’accompagner. Le résultat est probant ! La mélodie
douce-amère liée aux deux voix est une grande réussite ! Sur ce même
principe Oxmo Puccino, aussi produit par BB, a pu griffer de sa patte Hip Hop
un titre de Vengeance : « Belle Epoque ». Pour d’autre, ce sont
des rencontres lors de projet totalement différents qui ont abouti à certaine
chanson en duo. Je pense ici à ma chanson préférée de l’album au titre éponyme
à l’album, « Vengeance ». Ce duo avec Carl Barat (déjà évoqué dans From (The Sounds) Inside pour son album avec Pete Doherty au sein des Libertines) est une merveille. Ils se sont rencontrés lors d’une pièce de
théâtre de Monteverdi revisitée pop. L’amitié est directe et BB invite Barat
sur l’un des titres. La voix grave de C.Barat plonge encore plus l’ambiance
déjà sombre dans les abysses de la rancœur. Ses basses phrases prononcées sur
les partitions de violons sont du velours à l’oreille.
C’est
ici d’ailleurs toute la force de Biolay, créer des ambiances de folies.
Musicalement parlant, il pousse toujours plus le mélange des genres avec une
finesse rare. N’hésitant pas à placer des rythmes électro sur les violons qui
ont formé son originalité. Prenez « Venganza », l’introduction laisse
présager les douces plages d’Argentine dans ces accords chauds, cette
impression s’empresse d’être confirmée par la surprenante voix espagnole de Sol
Sanchez. Mais revirement de situation, c’est un rythme froid d’électro qui
accompagne cette voix si douce sur le couplet, avant d’être rejoint par les
violons et Biolay sur les refrains. Je ne sais quelle est la recette pour
réussir de tel mélange, mais ces cocktails de styles sont exquis.
Avec
tous ces compliments sur les duos, n’allez pas croire que Biolay n’a pas su se
faire de bonne chanson pour lui ! Ne serais-ce que la première chanson de
l’album est bonne, « Aime Mon Amour » est rythmé à la sauce Biolay,
avec des paroles toujours aux sens multiples et un refrain sortant n’importe
quand des trompettes réchauffant encore plus l’atmosphère. Toutefois, si je ne
peux placer cet album au-dessus des autres, ça sera sans doute par le
classicisme de quelques-uns des morceaux solos. « L’Insigne Honneur »
n’est pas à mon gout, BB n’aura pas réussi à faire peau neuve de son rythme
80’s et même si les paroles se targuent d’avoir quelque jeux de mots intéressants,
il en faut plus pour arriver à concurrencer le reste de l’album. De même pour
« Trésor, Trésor » qui pourrait passer pour une ballade
« Gainsbourgienne » mais qui finalement se termine en un morceau bien
trop lent qui s’asphyxie tout seul. C’est dommage car d’autre chanson sont
quant à elle léchée façon Biolay tel « Le Sommeil Attendra » ou
« La Fin De La Fin » et même si on aurait pu les entendre sur de
précèdent albums, on se réjouit d’instants et d’ambiance dont on connait déjà
les moindres recoins.
La
fin de l’album est bien plus pesante que le début, les duos d’Orelsan (bien
meilleur que je n’aurais jamais pu l’imaginer) et celui avec Carl Barat plonge
cette fin dans une sorte de mélancolie grisonnante, c’est pourquoi la dernière
chanson est un bijou. « Confettis » avec Julia Stone et son petit
accent Australien chantant en Français sur un air des plus léger permet de
sortir la tête de l’eau, comme de se réveiller d’un mauvais rêve en ouvrant les
yeux sur une belle journée ! Biolay
réussit cet album, bien plus accessible que ces précédents et pourtant toujours
aussi recherché, Vengeance peut sans doute devenir l’une des meilleures ventes
de cette fin d’année. Pour une fois qu’un bon musicien et parolier se voit
récompenser par le large publique autant s’en réjouir !